Editeur : Microsoft
Développeur : Rareware
Genre : Course / Aventure
Difficulté : Difficile
Durée de vie : 18h minimum
Joueur(s) : 1 à 8 en ligne
Langage : Français (textes et voix)
Date de sortie : 15 Avril 2010
Terminé par le testeur : Oui
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Voilà huit ans que le genre plate-forme compte parmi ses plus illustres références les aventures de Banjo et Kazooie. Mario et consorts peuvent toutefois dormir tranquille, l'ours et l'oiseau ont complètement viré de bord.
"Oh oh... help !"
Devoir passer du camp Nintendo à celui de
Microsoft peut déjà être dérangeant pour certains. Depuis le rachat du
studio anglais par la firme américaine, on sait en effet que Banjo et
Kazooie sont deux personnages susceptibles de débouler sur Xbox à tout
moment. Après un Grabbed by the Ghoulies raté sur la première Xbox (même
Banjo en parle dans Nuts and Bolts) et un Kameo réussi pour une entrée
en matière sur 360, Rareware revient aux affaires avec une de ses plus fortes
licences. A l'époque claque graphique et pur régal en
terme de gameplay, Banjo Kazooie et sa suite Banjo Tooie, ont offert à la
Nintendo 64 deux des plus belles aventures que compte le genre
plate-forme. Derrière la surprise que peut constituer l'arrivée d'un tel
titre sur une machine réputée adulte, Banjo Kazooie Nuts and Bolts est un jeu attendu depuis près d'une décennie par des millions de
joueurs.
Interminable, cette attente n'est pourtant pas franchement récompensée même si cela commence plutôt bien. Dès les premières secondes de
l'introduction, on reconnaît la vallée où les deux compères ont depuis
toujours élu domicile. La petite colline, le cours d'eau et la petite
cabane bordée de verdure sont toujours là. Pour apercevoir nos deux héros, il faut se tourner vers la beine à ordure. Banjo et Kazooie y sont
affalés, squattant devant la télé, avec au moins 20 kilos de plus chacun
par rapport à Banjo Tooie. Gruntilda n'étant jamais revenue depuis la
raclée de 2001, l'ours et l'oiseau se la coulent douce, vivant de leur
notoriété et comblant l'ennui comme ils peuvent. Une présentation qui
nous replonge tout de suite dans l'ambiance, délicieuse, de cet univers
faussement naïf où l'humour noir et les moqueries vont bon train, pour
un ton qui rappelle celui de Shrek au cinéma. Comme pour l'ogre vert, les références sont
nombreuses et même Mario en prend pour son grade. En résumé, jusque là tout va bien et ce n'est l'apparition du S.A.J. (pour Seigneur Absolu des Jeux vidéo) qui
va changer la donne.
Parce qu'il faut bien que quelque chose se
passe, cette espèce de télé flottante (au look dérangeant il faut
l'avouer) trouve amusant de ramener Gruntilda d'entre les morts pour voir
s'affronter de nouveau les deux camps ennemis. On pense être reparti
pour un tour de plate-forme aux quatre coins du monde mais la surprise
est à la hauteur de la déception qui va suivre lors des 18 prochaines heures de jeu.
Plongé au coeur de DuelVille, le joueur comprend vite qu'il n'a pas à
faire au jeu auquel il s'attendait. Certes Mumbo Jumbo est là, Humba
Wumba aussi, mais on nous parle de garage, de pièces mécaniques et de
construction de véhicule. Quelques instants plus tard, le doute
s'installe quand on comprend que la base du gameplay tourne
principalement autour de ces thèmes là. Un chariot de base nous est
offert et on nous fait comprendre que le but sera d'en faire un bolide
permettant d'atteindre des lieux alors inaccessibles. Le parti pris est
surprenant, mais on ne panique pas tout de suite car d'autres éléments
familiers nous rappellent au bon souvenir de la N64.
En visitant un peu Duelville, on tombe sur d'autres vieilles
connaissances comme ce bon vieux Klungo, le capitaine Blubber, l'ours
polaire Boggy ou encore les Jingos, toujours en galère, puisqu'il faut
ici les sortir de prison. Bref, toute la famille est réunie et on est
heureux de voir que la ville s'étend à perte de vue, renfermant un
nombre important de niveaux au regard des nombreuses portes encore
verrouillées. Comme l'indique le nombre inscrit au dessus de chaque
entrée, les niveaux se rendent disponibles selon notre total de pièces
de puzzles, ces dernières étant toujours le nerf de la guerre. Pour
obtenir des pièces, il faut remplir des missions, filer des coups de
main ou jouer des coudes dans chaque monde visité.
Aux nombres de six, ils se décomposent en autant de niveaux (qui se
déroulent dans une seule et même aire de jeu) et sont présentés façon
séries B des années 80. Entendez par là qu'au premier niveau de chaque
monde, on a le droit à une petite intro présentant les personnages cités
plus haut dans un rôle différent selon le lieu. Bottles, dont on
n'avait pas encore parlé par exemple, pourra y jouer le rôle d'un pilote
d'avion retraité ou d'un geek ringard. Ces rôles n'ont que peu
d'importance et ne visent qu'à orienter les dialogues précédant la
présentation de chaque objectif.
Une fois dans un niveau, il faut donc repérer l'emplacement des
personnages clés sur la carte pour aller leur parler et participer à
l'épreuve. Si ce procédé se répète jusqu'à la fin, les épreuves
proposées jouent heureusement la carte de la variété. Courses contre la
montre, contre des adversaires, ramassage et livraison d'objets, taxi,
escortes, jeux de ballon (basket, foot, water-polo...), saut en longueur,
bowling, rail shooter, duel de carlingues... on fait rarement deux fois
de suite la même chose d'autant que chacune de ces épreuves peut se
dérouler sur terre, dans les airs, sur mer ou en sous-marin (parfois
tout en un) ! Comme vous l'avez compris, toutes ces missions doivent être
remplies à l'aide de véhicules adaptés. Parfois fourni d'office, il est
souvent imposé de choisir soi-même quel bolide utiliser, et c'est là
qu'intervient le fond de commerce du gameplay.
Dans Duelville et dans chaque monde, Banjo et Kazooie peuvent ramasser
des notes de musiques qui servent principalement de monnaie. Grâce à
elles, on peut donc acheter de nouveaux plans et de nouvelles pièces
auto à Wumba. Couplées à celles ramassées dans des caisses souvent bien cachées, elles constituent petit à petit l'inventaire de notre garage.
Plus les étagères de notre garage sont fournies, et plus il est possible
de réaliser des modèles complexes. Le mot est bien choisi pour décrire
notre première impression avec le mode de construction. Il faut en effet
un certain temps pour s'adapter au raccourcis, faire tourner la caméra
autour du véhicule, en haut, en bas, à gauche, à droite, saisir qu'il est possible de
tourner chaque pièce dans n'importe quel sens... Une fois l'utilisation
du garage assimilée, reste ensuite à se creuser la tête parmi les
différentes familles d'éléments en notre possession. Puissance,
carburant, stockage, armes, chargeurs, roues, carrosserie, gadgets et
quelques autres encore... Chacune de ces catégories abritent des
sous-catégories qui peuvent contenir jusqu'à une dizaine de pièces
mécaniques chacune. Devant un éventail de possibilités infinies, car
la liberté nous est donnée de construire tout ce que notre imagination
nous permet, on peut heureusement partir d'un modèle préconçu, acheter
sous forme de plan à Wumba. Vélo, bateau, avion, hélico, formule 1,
char... là aussi le choix est grand mais cela permet d'avoir une
bonne base à laquelle il ne reste plus qu'à apporter quelques
modifications.
Exemple, vous devez affronter un ennemi flottant dans les airs et vous
ne possédez qu'un avion de base, dépourvu de système d'attaque et un peu
lent. Pas de problème, il suffit de lui ajouter deux lances-oeufs sous
chaque aile, sans oublier un chargeur de taille raisonnable pour ne pas
tomber à cours de munition. Voilà notre appareil d'attaque. Remplaçons
ensuite son petit moteur par un grand moteur et doublons notre capacité
de carburant sans quoi il piquera du nez avant d'avoir terminé le
combat. Notre adversaire est gonflable et sensible à tout ce qui pique ?
Alors garnissons notre avion de jolies pointes à chaque extrémité.
Attention toutefois à ne pas atteindre un poids trop important, sinon il
sera difficile de s'envoler.
Vous l'avez compris, il faut penser à tout. Ne comptez pas sur le jeu pour vous donner trop d'indices quant à
l'approche idéale. Il est ainsi possible de réussir une épreuve de mille
et une façons.
Un sentiment de liberté qui peut aussi être ressenti comme un abandon
pour les joueurs habitués à être pris par la main depuis quelques
années. Ceux là devront se mettre quelque chose en tête : Banjo Kazooie
Nuts and Bolt ne viendra pas à vous si vous ne vous investissez pas.
A
moins d'avoir rapidement un garage de grand standing et de fabriquer à
chaque coup le modèle parfait, il est récurrent de péter son câble à
répétition devant une progression qui en plus d'être redondante, se fait
par l'échec. Il n'est en effet pas rare de procéder comme suit : On
débarque dans un niveau, on parle avec un personnage qui nous explique
ce dont il a besoin pour nous offrir sa pièce de puzzle et à travers ses
dires, on choisit ou fabrique le véhicule qui nous semble adapté à la mission. En général, on se plante la première
fois. Retour au garage donc, nouveau modèle, changement de roues,
rééquilibrage des charges, nouveau moteur, le résultat se rapproche
davantage de nos besoins mais il manque encore un petit quelque chose. On
reprend un modèle précédemment sauvegardé, on modifie deux ou trois
petits trucs, sauvegarde le nouveau par un nom différent de l'ancien et
nous voilà enfin armé comme il faut. Autant dire que toutes ces
démarches, entrecoupées de petits temps de chargement à chaque passage
au garage, plombent sensiblement le rythme de progression. Investissement,
réflexion et patience sont donc les mots qui définissent le mieux le côté construction du
gameplay quand dextérité et persévérance illustrent le déroulé des
épreuves.
Si certaines sont d'une facilité déconcertante, d'autres imposent une
vigilance de tous les instants. Dans les moments les plus tendus, la
difficulté trouve son écho dans une maniabilité qui rend dingue sur
certaines surfaces (aussi prises en compte pour le choix de nos roues)
et pousse à la crise de nerf quand la caméra s'en mêle. Pour être
honnête, il m'est arrivé plusieurs fois de me demander pourquoi je persistais
à jouer à ce jeu qui ne me procurait aucun plaisir sinon celui de
gueuler des insanités à l'encontre de ses géniteurs pour leur choix ô
combien discutable d'opter pour un gameplay si... atypique.
D'un autre côté et par on ne sait quel miracle, Nuts and Bolts parvient à
se montrer accrocheur. La vaste superficie de Duelville et les nombreux
secrets qu'elle abrite y sont sans doute pour quelque chose puisqu'en
plongeant dans ses nombreuses quêtes annexes, on retrouve des sensations
propres aux jeux de plates-formes / aventure. Les nouveaux lieux
s'offrant à nous une fois notre véhicule amélioré, on se montre curieux
d'obtenir de nouvelles pièces pour aller visiter l'inexploré. L'ambiance étant
toujours agréable, on se réjouit de participer à des mini-jeux
inattendus comme le jeu d'arcade (hyper) rétro de Klungo avec ses
sauts au millimètre. Appréciables aussi, la qualité des mondes visités.
Bien qu'on aurait infiniment préféré les parcourir à pieds (la chose est
possible mais sans intérêt), ils offrent un terrain de jeu et une beauté
graphique de premier choix. Le level-design est à la fois bien pensé
et tortueux, tandis que les décors regorgent de bonnes idées ou de clins
d'oeil, avec une mention spéciale pour Banjoland. Sous couvert de
musée, l'endroit offre une version miniature des mondes parcourus sur N64.
Malgré cela, et en dépit d'un univers toujours aussi attachant grâce à ses
personnages, Banjo Kazooie Nuts and Bolts laisse un goût plus qu'amer.
Non seulement on se sent trahi par un système de jeu qui tourne le dos à
ses origines, mais en plus le parti pris choisi par Rareware n'a pas les
épaules et le degré de finition nécessaire pour nous aider à faire passer la
pilule. Pire, ce dernier se montrant répétitif et frustrant au bout de 4
ou 5 heures de jeu, il faut se faire fureur et prendre sur soi durant
les 13 heures qui suivent pour connaître le fin mot de l'histoire
(comptez 30 heures pour tout faire à 100%). Le plus rageant est de
constater par moment que le système est viable et d'une réelle
profondeur. L'erreur est d'avoir tout basé sur ce seul concept au lieu
d'en faire un point récurrent dans chaque monde par exemple, pour s'en
servir de respiration entre deux séquences de plates-formes. Ici, la
pilule est trop grosse, et pas suffisamment arrondie (problèmes de
caméra, certaines épreuves à la difficulté mal dosée...) pour pouvoir
être avalée.
Ce n'est pas le mode multijoueurs (plutôt désert) et son aspect
communautaire poussé (échange de photos, visionnage des exploits de
n'importe quel joueur) qui
suffiront à remonter le moral à ceux qui rêvaient de vivre un nouveau
dépaysement autour de la Montagne perchée. Ne reste plus qu'à espérer que
ce coup d'essai en parti raté, ne condamne pas une série au capital
sympathie sans égal. Banjo et Kazooie s'en font d'ailleurs la réflexion à
la fin du jeu... Comme quoi, Rare était quelque part conscient des
risques encourus. Alors en un mot comme en cent : pourquoi ?!
GAMELYMETRE
70%
REALISATION
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18/20
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Banjo
a un nez carré qui dérange, mais Gruntilda se targue d'être responsable
de cette horreur alors ça passe. Pour le reste, on retrouve
l'application habituelle de Rareware. Décors variés, fabuleux et
colorés, profondeur de champs immense... Le seul point du jeu sur lequel
il n'y a rien à dire.
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IMMERSION
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15/20
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On retrouve avec plaisir les thèmes musicaux bien connus et le langage hilarant de cet univers.
L'ambiance légère, emprunte d'humour et de remarques cinglantes en font
un monde agréable mais l'orientation du scénario (un duel Gruntilda /
Banjo et Kazooie organisé par une intelligence artificielle du jeu
vidéo) ne permet pas d'exploiter au maximum le potentiel du casting.
L'idée de mise en scène façon télé avec un rôle différent pour chaque
perso secondaire n'apporte au final pas grand chose. De ce fait, et
aussi soignés soient-ils, la majeure partie des dialogues n'est pas
lié à la trame principale et ces derniers deviennent vite facultatifs.
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PROGRESSION
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12/20
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Une
progression par l'échec au rythme plombé par les interminables
allers-retours dans le garage pour essayer de construire le véhicule
adéquat à chaque mission. Le concept s'essouffle et lasse avant le quart
de l'aventure et il faut se forcer pour en voir le bout. Le nombre de
niveaux et de secrets était pourtant appréciable mais il aurait fallu
les visiter dans d'autres conditions. Au final, le jeu est trop long pour ce qu'il offre.
Comptez 18h pour finir le jeu avec le minimum syndical de 75 pièces de puzzle. Pas loin de 30 heures pour obtenir les 131.
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MANIABILITE
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13/20
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Problèmes
de caméra, aspect savonnette de certains véhicules et verrouillage galère des
objets dans certaines situations.
En dépit d'un système habilement pensé pour être le plus simple
possible, l'atelier de construction demande aussi un temps d'adaptation.
Dans l'ensemble, et devant le challenge élevé de rendre un tel concept
plus ou moins maniable en toute circonstance, Nuts and Bolts ne s'en
tire cependant pas trop mal.
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FUN
&
GAMEPLAY
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12/20
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L'idée
est intéressante, le parti pris risqué et louable, mais le concept ne
peut amuser sur le long terme et remplacer les souvenirs de la crème des
jeux de plates-formes. Oui Nuts and Bolts est original, oui tout a été
pensé pour rendre le système cohérent et respectueux des logiques de la
mécanique. Oui le joueur est livré à lui-même comme rarement et on n'est
pas peu fier de trouver la solution après avoir placé sur notre
véhicule, la pièce qui fait toute la différence. Mais malgré tout ça,
non, on ne s'amuse pas la plupart du temps, hanté par le souvenir des
volets précédents et l'idée de ce qu'aurait pu être ce troisième épisode.
Par miracle, certaines épreuves sont aussi stimulantes qu'agaçantes, et on se surprendra à insister pour en réussir le plus possible, quitte à perdre quelques cellules grises.
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(Screenshots éditeur)
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